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[Article invité] - Marie Lequime, psychologue du travail et consultante en entreprise nous parle de la RSE

RSE MARCHES PUBLICS

L'Agence AGUINALIN vous propose un éclairage sur le thème de la RSE, qui nous semble intéressant suite aux dernières évolutions règlementaires. 

En effet, le gouvernement a une nouvelle fois appuyé son ambition sur le développement durable en lançant le 15 mars 2022 le Plan national pour des achats durables - PNAD - pour la période 2022 à 2025. Ce Plan fixe comme ambition d'atteindre, d’ici 2025, 100% des contrats de la commande publique notifiés avec au moins une considération environnementale et 30% avec une considération sociale.

 

Dans ce sens, la RSE, responsabilité sociale des entreprises, propose une approche globale pour répondre aux attentes environnementales et sociales. 

 

C'est pourquoi nous accueillons aujourd'hui Marie Lequime, psychologue du travail et consultante en entreprise afin de mieux comprendre les enjeux de la RSE et de profiter de conseils pratiques.

Merci Marie !

 

Qu'est ce que la RSE ?

On parle de responsabilité sociale ou sociétale des entreprises. Il s’agit d’une démarche volontaire de la part des organisations visant à intégrer les enjeux du développement durable, à moyen et long-terme, dans leur stratégie.

La norme de référence ISO 26000 définit la RSE ainsi : « La responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et activités sur la société et sur l’environnement ».

La RSE ce n'est pas un cahier des charges à cocher, mais plutôt une philosophie d'entreprise. Une entreprise ou organisation impliquée dans une démarche RSE va poser comme filtre sur ses décisions, stratégies et enjeux cette question « Quel impact ce projet, ce choix de matériau, cette  restructuration... va avoir sur la planète, sur la société, sur le bien-être des personnes ? ».

 

On reste dans le monde de l'entreprise, il ne s'agit pas de faire de la philanthropie, et la question de la performance et de l’efficacité reste centrale. Néanmoins les décisions stratégiques ne sont pas seulement prises en fonction de critères d'efficacité et de performance économique, mais en intégrant d'autres paramètres qui peuvent venir valider une décision peut-être moins performante à court terme mais à plus faible impact sur l'environnement.

En quoi la RSE intéresse une psychologue du travail ?

Marie LEQUIME psychologue du travail RSE

La RSE au départ ce n'est pas mon domaine d'activité. Mais dans le cadre de recherche autour des nouveaux modes de management et d'organisation du travail, la RSE a fini par attirer mon attention. On la connaît sur son versant d'incitation à une plus grande prise en compte des enjeux environnementaux tout d'abord. Dans le domaine des marchés publics, on va la voir souvent représentée dans des clauses environnementales et sociales (baisse des émissions de CO², gestion des déchets, insertion de public fragile).

Pour mon œil de psychologue du travail ce qui attire c'est l'aspect systémique de la RSE.

Le rôle de l'entreprise n'est plus une simple visée de réussite et de performance économique, mais une responsabilité beaucoup plus large, qui prend une envergure nouvelle avec une ouverture vers des enjeux à moyen et long terme où le bien-être de l'environnement et de l'humain sont vu comme primordiales et comme nécessaire à une vraie performance globale de l'entreprise.

 

Mon cœur de métier est de chercher à comprendre ce qui a fait perdre la capacité d'agir au sein des collectifs de travail, et de reconstruire du sens au travail. Ma question phare : Comment amener les organisations/les collectifs à retrouver du sens au travail ? Et au fil de mes lectures, j'en suis venue à me dire que la RSE pouvait être un levier formidable pour changer en profondeur notre mode d'organisation du travail et sortir du cycle de ces dernières années où la perte de sens, de cohérence, de valeurs du monde du travail a fini par rendre le travail et ceux qui le réalisent malades.

De quelle façon, penses-tu que la RSE puisse avoir un impact sur le fonctionnement ou l'organisation des entreprises ?

Parmi les 7 questions centrales proposées par la norme ISO 26000, celles qui concernent plus spécifiquement le psychologue du travail c'est moins l'écologie et le développement durable, que les questions ayant avoir avec :

   les relations et conditions de travail

   la gouvernance

Dans sa réflexion autour des relations et conditions de travail, la RSE devient un outil pour le bien-être au travail.

Les 5 domaines d’actions relatives aux « Relations et Conditions de travail » sont l’emploi et les relations employeur-employé, les conditions de travail et la protection sociale, le dialogue social, la santé et sécurité au travail et le développement du capital humain.

Une grande partie de cette question est déjà intégrée en France dans les obligations légales (document unique des risques professionnels, dialogue social effectif, représentativité des salariés, contrat de travail...).

 

La RSE vient donner une intention plus large porteuse de sens à ces obligations légales avec la recherche du développement du capital humain. Un capital humain vu comme indispensable pour le développement de la performance de l'entreprise, ainsi QVT, lutte contre les discriminations, mixité, handicap/fin de carrière/usure professionnelle (ergonomie, employabilité, adaptation du travail à l'homme ne sont plus seulement des obligations légales mais des valeurs constitutives de l'entreprise. 

L'autre particularité de la RSE qui impacte le fonctionnement et l'organisation de l'entreprise est l'attention portée à la question de la gouvernance.

Le type de gouvernance prôné par la RSE passe par un meilleur équilibre des pouvoirs entre toutes les parties prenantes que sont les dirigeants, les actionnaires, les salariés, les fournisseurs, les clients, les banques, l’état, ainsi que les structures externes impactés.

Il s'agit d’un fonctionnement équitable et participatif qui tient compte de l’avis et des intérêts de chacun selon les objectifs de l’entreprise, tout en maîtrisant les risques.

 

L’entreprise doit assurer une certaine transparence dans la prise de décisions et concernant ses activités dès lors que celles-ci engendrent des répercussions sur la société et l’environnement.

Cette notion de gouvernance partagée où les parties prenantes sont dans la boucle des prises de décision vient « casser » la tendance hors sol, très gestionnaire et court-termiste des modes de direction actuelle.

La prise en compte de tous les acteurs n'est plus vu comme une mode de management bienveillant, que certains qualifiés de monde de « bisounours », mais bien comme la meilleure réponse stratégique à apporter pour être capable de faire face à notre monde changeant et incertain avec efficacité, performance et en cherchant à avoir une vision où tous les angles-morts peuvent être repérés et pris en compte.

 

Le cas de la catastrophe écologique dans le Golfe du Mexique en 2010, avec l'explosion de la plateforme pétrolière de BP, a amené de nombreux spécialistes à conclure à un défaut de gouvernance. Une gouvernance à œil unique, avec un conseil d'administration constitué uniquement des dirigeants et de spécialistes du management dont l'analyse et l'angle de vue purement gestionnaire, a insuffisamment pris en compte les risques écologiques et industriels. Il est évident dans cette affaire, que si les parties prenantes concernées : salariés, clients, l'Etat, les spécialistes de l'environnement avaient eu un rôle au sein de BP les risques encourus auraient été davantage repérés et des actions de correction mises en œuvre.

 

Ainsi selon la norme ISO 26 000, « l’objectif du dialogue entre une organisation et une ou plusieurs de ses parties prenantes est d’éclairer les décisions de l’organisation ».

C'est très intéressant parce que l'on est avec cette vision RSE sur un changement de paradigme. Ce qui s'observait dans le monde de l'entreprise c'est une montée de la pensée gestionnaire avec des notions d'optimisation, d'amélioration de la marge, d'enlever « le gras » inutile ou moins performant, pour une efficacité immédiate, court-termiste, on est aujourd'hui dans une vision beaucoup plus systémique et à long terme.

Est-ce que la RSE concerne les petites et moyennes entreprises ?

RSE

Du côté des petites et moyennes entreprises, l'implication dans une démarche RSE reste encore timide.

Le degré d'implication de ces sociétés dans la RSE dépend très fortement de l'investissement du dirigeant et de sa motivation. Les principaux freins évoqués à la mise en place d'une politique RSE sont le manque de temps ou d'information et le manque d'appui public.

 

La RSE reste pertinente et intéressante, même quand on est une PME.

 

S'engager dans une démarche RSE amène une réflexion globale qui invite à donner une vision à son action, à définir ses valeurs, les lignes phares de son engagement et les mesures concrètes pour les mettre en œuvre.

 

Cette mutation vers une entreprise plus responsable va présenter de nombreux atouts autant en interne avec ses salariés, qu'à l'externe pour ses clients.

 

    en interne : Effets positifs sur les salariés

 

Implication des collaborateurs et productivité

 

La démarche RSE imprègne les conditions de travail dans l’entreprise encourageant l’implication des collaborateurs et favorisant ainsi la productivité de l’entreprise.

Le sentiment que leur travail a une portée bénéfique sur l’environnement va redonner du sens à l'activité professionnelle réalisée et jouer positivement sur la motivation.

 

La transparence, les valeurs positives, la prise en compte des salariés dans les décisions stratégiques vont faire monter en flèche la confiance des équipes. Cette confiance va donner les moyens à l'entreprise de faire face avec plus de facilité aux crises et imprévus.

 

En externe : Impact positif sur les clients/consommateurs

Aujourd’hui, pour plaire aux consommateurs, il faut avoir une éthique sociale et une production respectueuse de l’environnement. Dans leurs critères d'achat, de plus en plus de consommateurs vont faire jouer le paramètre de durabilité et de production respectueuse de l’environnement et de l'Humain.

Quels conseils pour les entreprises qui voudraient se lancer ? Quel accompagnement proposes-tu ?

Le plus important selon moi, c'est que la démarche RSE mise en place soit concrète et tangible.

Ne pas se donner d'objectifs de transformation trop ambitieux, mais le faire vraiment !

 

Il n'y a pas de cadre légal sur cette démarche mais seulement une invitation à prendre en considération son impact environnemental et social. Il n'est donc pas nécessaire de se lancer dans une « usine à gaz » difficile à mettre en œuvre par l'organisation et source de travail supplémentaire pour les équipes.

 

Il vaut mieux avoir un vrai axe fort sincère, qui a du sens pour le/la chef d'entreprise et les équipes, que de vouloir faire un saupoudrage inefficace et parfois contre-productif car un sentiment d'artificialité sera ressenti par l'extérieur, mais pire encore par les salariés en interne.

 

Quelques exemples d'engagement portés par des entrepreneurs convaincus : 

 

     Un employeur du bâtiment investi dans l'accueil et l'accompagnement de jeunes en situation de rupture.

     Un restaurateur qui cuisine avec des produits locaux par souhait de favoriser les circuits courts, le développement de l'agriculture local et de diminuer son impact écologique.

     Une société d'expertise comptable engagée dans une réflexion et des actions internes et externes pour diminuer son impact énergétique autant sur les produits physiques (papier principalement), que dans sa consommation énergétique liée à ses usages numériques (données numériques stockées, envoi de mails,...).

 

C'est aussi de cette façon que votre entreprise pourra localement se démarquer et mettre en avant sa différence. Parfois l'employeur n'a pas conscience de ce qui le caractérise et ce qui fait que son entreprise a une façon qui lui est propre d'être en relation avec son environnement.

 

L'accompagnement proposé par En'Quête de Sens pour engager une démarche RSE à échelle humaine, c'est :

  1.  Clarifier les valeurs qui sous-tendent les actions de l'entreprise. Deux possibilités, soit par une approche centrée sur les valeurs du dirigeant et son envie de les diffuser dans son organisation (voir les exemples présentés plus haut), soit par un travail d'élaboration de valeurs communes avec l'ensemble du collectif de travail. Une réflexion sur la raison d’être de l’entreprise qui va donner le cadre et le fil conducteur des actions à mettre en œuvre.
  2. Repérer les impacts de l'entreprise sur son environnement. Définir les axes d'amélioration prioritaires en fonction des valeurs et proposer des solutions concrètes. Impliquer les parties prenantes afin d'éviter les angles-morts. Grâce à la facilitation, stimuler l'intelligence collective et l'émergence de solutions innovantes et créatives.
  3. Vous accompagner dans le déploiement de votre stratégie de RSE, la mise en place d’un pilotage et d’une communication RSE jusqu’à l’obtention d’un label RSE.

Une autre modalité d'intervention envisageable est de passer par de la formation pour donner un premier niveau de connaissances à vos équipes, et commencer à engager une démarche de changement. Formation possiblement finançable par votre opérateur de compétences (OPCO)

 

MARIE LEQUIME RSE
MARIE LEQUIME RSE PSYCHOLOGUE TRAVAIL

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